On sait bien qu’en effeuillant la marguerite, un peu, beaucoup, passionnément, on arrive à la folie. Que serait un amour « raisonnable » qui à la façon d’un horloger serait capable d’observer ses propres microscopiques engrenages et qui, en comptable tatillon, soupèserait les raisons d’aimer toujours plus et celles de ne point aimer davantage ou d’aimer avec modération ?
L’amour n’a pas de raison: au sens où nul motif jamais n’explique que l’on aime, sauf l’être même de l’aimé(e), et où la raison, quand l’amour est là, vacille, s’aveugle ou s’anesthésie. L’on n’aime pas « parce que », ni « pour un temps », ni « plus ou moins », ni « à certaines conditions » – pas même celle d’être aimé(e) en retour. La seule mesure de l’amour, c’est la démesure. Il n’a même pas de langage propre pour se dire, se fie aux milliers de métaphores, pleines de flammes, de cœurs et d’ardeurs, ou se réfugie tantôt dans le silence tantôt dans le chant ou le cri. Sans doute la littérature est-elle assez puissante pour le faire «sentir», cet amour fou, absolu, taciturne ou lyrique. Mais la philosophie ? Elle n’a pas cessé certes d’interroger l’amour – mais a-t-elle des concepts assez puissants, ou assez fluides, pour rendre raison de ce qui n’a pas de raison, l’amour fou ?
Retrouvez l’ouvrage publié à autour de cet événement avec la participation de Sarah Chiche, écrivaine, psychologue clinicienne, psychanalyste, Yannick Haenel, écrivain et Paul Audi, philosophe avec une introduction de Raphael Zagury-Orly.