L’histoire – Hegel nous l’a enseigné – engage l’humanité à témoigner des événements qui l’ont constituée et façonnée. L’humanité se doit ainsi de se reconnaître dans le déploiement de son histoire, et donc se comprendre comme le devenir historique du sens, de l’éthique et de la raison. Paradoxalement, et à même ce devenir historique, il survient des événements aussi singuliers qu’imprévisibles qui, loin d’avancer et conforter le récit progressiste de l’histoire, le consomment et l’interrompent. En ce sens, tout en passant, le temps se voit toujours rattrapé par des événements historiques qui ne passent pas et ne se laissent pas reléguer au passé. Comment penser ces passés qui se refusent à leurs mises au passé et qui incessamment rompent, par leurs singularités ineffables, le fil directeur et conducteur, le sens, l’orientation et la raison de l’histoire ? Dans le sillage de cette question, il faudra donc repenser les modalités selon lesquelles l’homme peut se rapporter à ces événements historiques singuliers et comment ceux-ci affectent la possibilité même de constituer un discours rationnel quant à son devenir historique. Comment l’humanité doit-elle témoigner de son propre passé dès lors que ce passé emporte la possibilité même d’en témoigner ? Comment penser le témoignage d’événements historiques singuliers sans les réduire à une narrativité – narration ? – toujours déterminée et déjà trop prompte à les justifier ?
Présenté par Raphael Zagury-Orly.