Sexe, mensonge et écrans

Rencontre

Cet événement est intégré au cycle « Semaine PhiloMonaco 2025 »

C’est ambigu, un écran. Si quelque chose fait écran, on ne voit rien, et si on veut voir quelque chose – ne serait-ce qu’une image – il faut regarder l’écran. Autrement dit, l’écran cache et montre. Jamais dans l’histoire du monde on n’avait eu tant d’yeux rivés en même temps et à toute heure sur des écrans ; et on ne songe même plus que le regard fixé sur l’écran ne voit guère ce qu’il y a autour – si bien que dans certains pays, où l’on marche comme partout en baissant les yeux pour regarder le display du smartphone, les autorités ont peint par terre les couleurs des feux de circulation. Si une grande partie des activités quotidiennes se déroulent désormais devant un écran, de l’ordinateur ou du portable, il était escompté que le sexe y prendrait sa place, et, avec lui, la possibilité de voiler et dévoiler, de mentir, d’inventer des histoires, de thésauriser des secrets, de se constituer une zone d’intimité que l’on voudrait inviolable (aussi rabat-on le couvercle du portable à l’arrivée de quelqu’un, pose-t-on à l’envers son téléphone et coupe-t-on le son, empêche-t-on qu’un autre vienne fouiller son contenu, etc.). Bien qu’il soit difficile d’obtenir des données statistiques sur leur fréquentation, c’est par millions que dans chaque pays se compte le nombre de personnes qui quotidiennement, jour et nuit, échangent sur des tchats sexuels, et si on ajoute la fréquentation des sites pornographiques, le streaming en direct, les sites de rencontres, les sites de webcam, le cybersexe vocal, les jeux de rôles, l’échange de photos et de vidéos par téléphone, on pourrait conclure que l’écran est devenu un partenaire sexuel essentiel, pour ceux et celles qui ont des partenaires sexuels et ceux et celles qui n’en ont pas. Le smartphone en est un particulier, parce qu’en lui-même il est déjà un objet de plaisir – sinon il n’aurait jamais eu autant de succès – et parce qu’il a ouvert à des formes de séduction, d’amour et de sexualité nouvelles, en diminuant certes les rôles sensuels du tact, du goût et de l’odorat, mais en accroissant considérablement la puissance érotique de l’ouïe et de la voix. Se contentera-t-on de cela ?

Intervenants

Géraldine Muhlmann

Philosophe et journaliste, membre du Jury

Géraldine Muhlmann est philosophe et politiste. Agrégée de philosophie et de science politique, elle est professeur à l’université Paris 2…

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Isabelle Alfandary

Auteure et professeure, membre du Jury

Professeur de littérature américaine et de théorie critique à l’Université Sorbonne Nouvelle, Isabelle Alfandary est l’auteur de plusieurs écrits relevant…

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Sarah Chiche

Écrivaine, psychologue clinicienne, psychanalyste

Sarah Chiche est écrivain, psychologue clinicienne (diplômée de l'université Paris Diderot) et psychanalyste. Elle est l'auteur de quatre romans -…

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Samuel Dock

Psychologue clinicien et écrivain

Samuel Dock est Docteur en Psychopathologie,  psychanalyste et écrivain. En 2012, son premier roman « L’apocalypse de Jonathan » (Le Manuscrit) rencontre…

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Normalien, agrégé d'anglais, Augustin Trapenard est un journaliste, universitaire et critique de livres et de films français. Il a étudié à UC…

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