La rencontre débutera par la projection de l’œuvre Grosse fatigue, vidéo couleur et sonore de 13 mn, réalisée par Camille Henrot en 2013 et acquise la même année par le Nouveau Musée National de Monaco.
Si la vérité a à voir tantôt avec la connaissance, en ce qu’elle est, dans son sens basilaire, concordance entre une pensée, un jugement ou une théorie et le réel (ou un segment de réel, car celui-ci est infini) et s’oppose donc à la fausseté, tantôt avec la morale, en tant que dire-vrai qui s’oppose au mensonge, alors son rapport avec l’art se révèle, dans les deux cas, énigmatique. En quoi l’art saisirait-il une partie du réel, même momentanément – comme le fait la science – et en quoi pourrait-il (ne pas) mentir ? En réalité, les choses ne sont pas aussi simples, car l’art, qu’il soit plastique, visuel, graphique ou sonore, laisse bien voir ou entendre quelque chose du monde, sinon ce qui, dans le monde, ne s’entend pas ou ne se voit pas. On objecte en général qu’il y aurait là quelque illusion, puisque le « sens » que l’on attribue à l’art relèverait de la subjectivité et de l’interprétation que chacun donne ou fait sienne d’une œuvre, ce qui, au mieux, autoriserait à dire que l’art produit et fait coexister une multiplicité de vérités. Mais cette option est elle aussi fragile, car, à l’admettre, on ne comprendrait pas comment une œuvre d’art pourrait continuer à produire du sens, interroger, inquiéter, réjouir, plaire, alors même qu’elle perdure à travers les siècles et qu’à travers les siècles les régimes de subjectivité, de sensibilité et d’intellection ont mille fois changé. Aussi la vérité de l’art ne peut pas être celle de l’« individu » qui la produit ou la reçoit, mais une vérité du monde et de l’humanité qui « contient » même ce que l’humanité, avec ses outils de connaissance, de sensation et de « sentiment », ne peut pas dire du monde ni d’elle-même.
En collaboration avec le Centre Pompidou et le Nouveau Musée National de Monaco