Violences et politique, politiques de la violence // CĂ©line Spector

Philo Blog

La question que vous m’invitez Ă  poser ce soir est la suivante : si l’État, et en particulier l’État moderne, naĂźt du besoin de sĂ©curitĂ© des individus, jusqu’à quel point le politique est-il justifiĂ© Ă  user de violence pour circonscrire la violence ? Lui est-il permis d’entraver les libertĂ©s individuelles afin de garantir la sĂ©curitĂ© de la sociĂ©té ? Comment Ă©viter la dĂ©rive du politique dans la propagation de violences autoritaires, voire totalitaires ?

Afin d’y rĂ©pondre, je souhaiterais faire un bond en arriĂšre et revenir Ă  un philosophe qui me semble dĂ©cisif – dĂ©cisif afin de penser la nĂ©cessitĂ© pour l’État moderne de conjurer la violence qui risque toujours de lui devenir consubstantielle : il s’agit de Montesquieu. Dans De l’esprit des lois (1748), Montesquieu a en effet pris trĂšs au sĂ©rieux la question de la violence qui menace les individus quand l’instrument Ă©tatique de protection se retourne en instrument d’oppression. Il a mis au cƓur de son analyse la question philosophique de la tyrannie ou plutĂŽt, comme il la nommait, du despotisme – celle de l’État violent, qu’il oppose de maniĂšre structurelle Ă  toutes les autres formes d’État, dits « modĂ©rĂ©s », qu’ils soient dĂ©mocratiques, aristocratiques ou monarchiques. Ce qui lui importe est prĂ©cisĂ©ment cela : comment concevoir les procĂ©dures institutionnelles et les garanties procĂ©durales qui permettent d’éviter Ă  l’État de suivre sa tendance naturelle Ă  l’abus de pouvoir, d’éviter l’arbitraire et de maintenir les conditions de la libertĂ© politique ? (
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Céline Spector, « Politiques et violence, violences de la politique », La violence, Les Rencontres Philosophiques de Monaco, 2018, p.77

 

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