ÉDITO // Charlotte Casiraghi

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La fête unit les hommes dans une expérience affective, dans l’oubli comme dans la mémoire, dans le solennel comme le frivole, et les fait partager leur joie d’être ensemble. Elle n’est pas que pur divertissement, espace de fuite crées pour consommer, éviter l’ennui, s’évader dans le vertige de la jouissance et de l’ivresse. Dans la Grèce antique, les fêtes dionysiaques avaient, comme dans la tragédie, une fonction cathartique, et permettaient de se purifier, se défaire de ses peurs, sublimer ses pulsions en désorganisant momentanément l’ordre social et les conventions. La fête met en relation ce qui est ordinairement séparé, et libère les hommes, emportés par l’élan de la musique et de la danse, de leur rôle social, de leurs préoccupations ordinaires, du règne de la nécessité, pour explorer tous les possibles, retrouver le présent et renforcer les liens d’amitiés. La fête est aussi un point de passage entre les vivants et les morts, le sacré et le profane, le sauvage et le civilisé, et ne vise ni à détruire ni à oublier ce qui nous attache à la vie, mais à créer une réserve d’énergie qui lie les êtres face au poids de la mort. 

 

Charlotte Casiraghi, « ÉDITO », Le Cahier 3, Les Rencontres Philosophiques de Monaco, 2018, p.3

 

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